J’ai donc réalisé une installation qui a évolué dans le temps, Lucky[1](Plessiet 2012b) en hommage à la pièce de théâtre de l’absurde de Samuel Becket En attendant Godot (Beckett 1952). Cette installation de réalité virtuelle plaçait l’utilisateur dans la vue subjective du maître Pozzo contrôlant son esclave Lucky par la voix et par une corde qui lui enserre la gorge. La relation entre le personnage de Lucky et le personnage de Pozzo a eu une influence profonde dans ma création et mon rapport à l’informatique, j’y vois comme une métaphore de mon rapport personnel avec l’outil informatique.
Lucky est typiquement un Golem Virtuel, il n’est pas capable de prendre des initiatives, mais dispose de la capacité motrice qui lui permet d’obéir aux ordres, à savoir aller à un endroit ou un autre, prendre tel ou tel objet, se relever s’il est tombé… Il est en mesure de comprendre une vingtaine d’expressions comme « viens », « pars », « va à l’arbre », « prends la valise », en anglais et en français. Il est en grande partie construit autour des briques du projet OutilNum (Plessiet, Chaabane, et Khemiri 2015) que nous détaillerons dans le chapitre 5.
Le dispositif repose sur un système haptique appelé falcon auquel est attachée une corde, un microphone qui enregistre la voix du spectateur, un casque de réalité virtuelle et dans les premières versions une Kinect, remplacée par la suite par une leapmotion. Cette installation a existé en deux versions : une première sous le moteur de jeu Unity et une seconde sous Unreal (rebaptisé Lucky 2.0). Ces différentes versions m’ont permis de confirmer certaines de mes intuitions sur l’engagement sympathique.
[1] Plessiet, Cédric. 2012. « Lucky 2.0 ». Semaine des Arts (Université Paris VIII), Ars Electronica (LIntz/Autriche) 2015 ; ; Savante Banlieue (Villetaneuse/France) 2012 ; Zoom, Espace de culture numérique (Bourg en Bresse/France), Bibliothèque de Châtenay-Malabry 2013.